Colloque « Tiers-Lieux, Organisations et Territoires », Caen, mars 2021

Appel à communication

Colloque « Tiers-Lieux, Organisations et Territoires », Caen, mars 2021

Les tiers-lieux, des objets d’intermédiation ?

Dialogues croisés entre organisations et territoires

Contexte :

La démocratisation et l’utilisation généralisée des nouvelles technologies entamées au début des

années 2000 a contribué à l’apparition de nouvelles formes d’espaces regroupés sous le vocable de

« tiers-lieux » (Burret, 2015).

Pour dynamiser les territoires, le gouvernement a donné ces deux dernières années un « coup

d’accélérateur » au développement des tiers-lieux. La mission « Coworking : Territoires, Travail,

Numérique » a remis en septembre 2019 un travail commandité par le secrétaire d’Etat auprès du

ministre de la cohésion des territoires, Julien Denormandie qui avait annoncé en septembre 20181

, un

plan de 110 millions d’euros sur trois ans pour renforcer et déployer ces espaces de travail partagé où

se mêlent « fabrication » et « réseau d’échanges ». L’économie du savoir et les transformations du

numérique bouleversent nos modes de vie, et en particulier nos manières de travailler (Tremblay, 2015).

Cette situation est particulièrement prégnante ces derniers mois, en raison de la crise sanitaire de la

COVID. Durant l’été 2020, cette crise a incité le gouvernement à orienter son plan de relance en faveur

des territoires. Il a ainsi encouragé la fabrication et le développement de 500 « manufactures de

proximité » afin d’une part de soutenir les acteurs tiers-lieux opérant sur le territoire mais également

de recréer localement du lien social et économique en permettant une mutualisation des coûts entre

les différents acteurs économiques d’un même territoire.

Rappelons que les tiers-lieux renvoient au concept de rencontre entre acteurs, au sein d’un espace

favorisant les échanges, la socialisation, la communication et les actions ou interactions (au sens de

Georg Simmel,1981) susceptibles de faire émerger une communauté, basée sur des liens de complicité

intellectuelle, mais sans pour autant supposer une similarité complète entre les membres (Odenbourg,

1989). Leur diversité en termes d’activités, de localisations, de dimensions ou de formes juridiques en

font des « objets » aussi difficiles à appréhender qu’intéressants à étudier, tant d’un point de vue

organisationnel que de leur inscription territoriale. De plus, leurs acceptions sont aujourd’hui

nombreuses2et en évolution permanente (Liefooghe, 2018). Au travers d’une typologie riche et variée

nous pouvons distinguer une classification bien établie : des tiers-lieux d’activités qui relèvent des

espaces de coworking, à la fois lieu de travail, de collaboration et de communautés ; des tiers-lieux

d’innovation qui cherchent à démocratiser les procédés d’innovation par la mise à disposition de

matériels et le partage d’expérience, tels les FabLab et les LivingLab ; des tiers-lieux culturels qui

promeuvent une culture de l’expérimentation, de la mise en scène et de la coproduction des savoirs et

des cultures ; des tiers-lieux sociaux essentiellement structurés autour de la promotion de la

participation citoyenne, de la transition démocratique et de l’économie sociale et solidaire ; et enfin des

tiers-lieux de service et d’innovation publics mis en place à l’initiative des collectivités pour redynamiser

certains territoires et les réinvestir lorsque les services publics et commerces sont partis (Besson, 2019).

Ainsi, ces différentes typologies reflètent des lieux organisationnels mouvants, à construire, par et au

service des acteurs qui les occupent, les gèrent et les font vivre sur les territoires.

1 « Les « tiers-lieux» seront au centre du plan de relance »,Corinne Caillaud, le Figaro le 22 juin 2020

2 « Le tiers-lieu, objet transitionnel pour un monde en transformation », Liefooghe Christine, L'Observatoire, n° 52, 2018, p. 9-11.

2

Ces deux angles, organisationnel et territorial, permettent de nous interroger sur les opportunités

d’espaces de travail pour les travailleurs indépendants et les télétravailleurs, mais également de

(re)dynamisation et de développement des territoires. Ainsi, via l’étude des tiers lieux, apparaissent des

solutions alternatives pour des entrepreneurs, des indépendants ou des salariés qui investissent un

espace de travail proche de leur(s) résidence(s) qui n’est ni leur domicile, ni leur entreprise. Le

coworking s’est également développé par la volonté de salariés d’échapper au dirigisme de la grande

entreprise et aux règles de management oppressantes (Dupuy 2015). Enfin, nous pouvons nous

interroger sur les bénéfices de l’utilisation des tiers-lieux pour les entreprises et les salariés, notamment

l’accès à une nouvelle forme de socialisation et de communauté de travail (Garrett et al., 2017). Au

regard de l’émergence des nouvelles formes organisationnelles du travail, le coworking ou espace de

travail collaboratif s’est imposé comme une opportunité pour certains acteurs économiques

(collectivités territoriales, micro-entrepreneurs, associations ...). Les tiers-lieux, bien qu’encore mal

« identifiés » en termes d’organisations sont pourtant inscrits à l’agenda des politiques publiques de

développement territorial. Ils sont également désignés comme contributeurs à la redynamisation des

activités en milieu urbain et rural, favorisant le maillage territorial de celles-ci et devenant de véritables

leviers d’attractivité pour certains territoires. A cet égard, la région Nouvelle-Aquitaine et son réseau de

labélisation qui compte près de 260 tiers-lieux repartis sur l’ensemble de son territoire est un exemple

intéressant à observer.

Les espaces collaboratifs donnent l’impression qu’ils se concentrent pour l’essentiel en milieu urbain

(Capdevila, 2015). Comme le rapporte également la mission “Travailler autrement” (2018), les tiers-

lieux se concentrent en grande majorité au cœur des villes, au sein de la culture urbaine et numérique

(Anderson,2012). Néanmoins, « France Tiers-lieux », dans ce même rapport, nuance ce constat en

soulignant que 45% des tiers-lieux se développent en dehors des centres urbains denses.

De plus, le territoire métropolitain avec ses sites de production et de recherche, sa densité, sa diversité

sociale et ses multiples aménités, produit une série d’externalités qui s’avèrent essentielles au

fonctionnement et à l’attractivité des tiers-lieux (Moriset, 2014). Ils deviennent alors des enjeux de

développement territorial entre espaces ruraux et urbains plus denses pour certains ou de simples

opportunités urbanistiques et de (re)valorisation pour d’autres, s’inscrivant dans le cadre de plan de

réhabilitations de friches industrielles ou de bâtiments publics.

Deux pensées émergent alors, tant concernant la place et visée stratégique de l’objet des espaces de

coworking par les collectivités territoriales des agglomération moyennes, y voyant un levier de

développement économique et/ou urbain ; ou bien par opportunité (y compris immobilière) ou

mimétisme, tant les espaces de coworking seraient la figure montante d’un développement

métropolitain. (Leducq, Demaziere & Coquel, 2019). Ces deux stratégies permettent la justification de

la politique d’aménagement urbain local, via la création de nouveaux tiers-lieux. Nous retrouvons ces

idées dans l’ouvrage « Tiers-lieux : travailler et entreprendre sur les territoires ... » 3 qui fait le constat

de recherches récentes sur le concept, tant du point de vue de ses diverses typologies que comme

objet des attentions institutionnelles territoriales (car potentiel creuset d’emploi et d’innovation) ou

comme aspiration à travailler, se déplacer, s’organiser voire innover autrement.

3 « Epiphénomènes d'une mutation sociétale, fruit de l'économie numérique, les tiers-lieux interpellent les décideurs publics territoriaux sur l'attitude à adopter, de

l'intérêt bienveillant à une tutelle complète » Ouvrage réunissant une équipe pluridisciplinaire de chercheurs présente un matériau empirique original sur cette réalité

émergente, encore mal connue : celle de la multiplication des tiers-lieux dans les villes et hors des centres métropolitains. Il pose de nouvelles questions, encore peu

traitées dans la littérature, en s'intéressant à la trajectoire sociale des fondateurs d'espaces de coworking, aux nouvelles manières des jeunes générations de travailleurs du

numérique de conjuguer leurs aspirations de liberté et d'épanouissement dans les domaines professionnel et privé, ainsi qu'à leurs nouveaux rapports à la collaboration, au

travail, au territoire, à la mobilité et aux questions écologiques ; Gerhard Krauss (Auteur) Diane-Gabrielle Tremblay (Auteur) Travailler et entreprendre sur les territoires :

espaces de coworking, fablabs, hacklabs... Paru le 10 octobre 2019 Essai (broché)

3

L’objectif, à travers cette manifestation de recherche, sera la mise en exergue et l’interrogation de

l’intrication existante entre l’organisation des tiers-lieux et son évolution en tant qu’objet de

développement territorial et d’aménagement.

Trois grandes thématiques ont été identifiées pour ce colloque : « Tiers-Lieux, Organisations et

Territoires » / Les tiers-lieux, des objets d’intermédiation ? Dialogues croisés entre organisation et

territoire et qui sont énoncées de la manière suivante :

Thème 1 : Le Tiers-Lieu sous le prisme de l’organisation

Cet atelier questionne les tiers-lieux en tant que nouvelle forme organisationnelle dont les contours et

le fonctionnement sont encore en définition :

- Les enjeux stratégiques et managériaux : finalité, activités, gouvernance (formes juridiques,

viabilité du modèle économique...), management/animation

- Les relations entre les individus dans le Tiers-Lieu (horizontalité/verticalité, émulation entre

pairs...)

- L’individu dans le Tiers-Lieu (motivations, comment il y travaille, comment il y vit, QVT...)

Thème 2 : Le Tiers-Lieu sous le prisme du territoire

Cet atelier questionne les relations entre le territoire et les tiers-lieux, vus comme des leviers

d’attractivité et d’aménagement des territoires urbains ou ruraux à travers les sous-thématiques

suivantes :

- Le tiers-lieu comme outil ou levier d’aménagement du territoire

- L’étude de la relation des spécificités territoriales, de l’aménagement du Tiers-Lieu ainsi que

de son appropriation par les utilisateurs

- L’opportunité de l’utilisation et de l’accessibilité du lieu

-

Thème 3 : Les Tiers-Lieux, nouvelles relations de proximités entre acteurs

Cet atelier questionne les réseaux inter-organisationnels, leur structure, les relations entre acteurs

publics et acteurs privés, les relations entre acteurs privés (corpoworking, co-workers issus des

entreprises) et les relations entre Tiers-Lieux (réseau, coopération, nouvelles initiatives) :

- Le tiers lieu sous l’angle de l’innovation territoriale

- Le tiers lieu sous l’angle de l’innovation organisationnelle

- Le tiers lieu comme source d’innovations sociales

Les propositions attendues pour ce colloque peuvent être de nature théorique, empirique ou

méthodologique. Les communications retenues pourront répondre aux thématiques ci-dessus (sans

exclure d’autres manières d’interroger les tiers-lieux d’un point de vue territorial ou organisationnel).

A noter :

Une manifestation de recherche francophone, mais les études internationales sont les bienvenues

Un caractère pluridisciplinaire rapprochant sciences de gestion et science régionale (économie,

géographie, aménagement) mais également science politique, sociologie, psychologie...

Des ateliers thématiques et sessions plénières (Conférence & Table ronde) permettant un dialogue

croisé entre chercheurs et praticiens, à travers la présence de représentants de TL, d’utilisateurs de TL,

d’institutionnels ou de porteurs de projets.

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Déroulement et organisation du colloque

Le colloque se déroulera sur 1 journée le 24 mars 2021, sur le campus de Caen de l’EM Normandie ou

en distanciel en fonction des mesures sanitaires liées à la crise de la Covid-19.

Processus de sélection des communications et calendrier

- Pour le 4 janvier 2021

Envoi d’un résumé en français de 800 mots maximum (avec bibliographie) comprenant le nom

et les coordonnées du (des) auteur(s), le titre de la communication, la présentation de la

problématique, un court développement du cadre théorique, du terrain, et des principaux

résultats attendus

Résumé à adresser à : tlnormandie@gmail.com

- Pour le 5 février 2021

Retour aux auteurs

- Pour le 1er mars 2021

Envoi du texte complet des communications à : tlnormandie@gmail.com

- Le programme définitif du colloque sera communiqué courant mi-février / début mars 2021

Valorisation des communications :

Le colloque fera l’objet d’une valorisation. Les meilleures communications pourront faire l’objet

d’une soumission à des numéros spéciaux des revues. Des discussions sont en cours avec une revue

en sciences de gestion et une revue en science régionale, toutes deux classées.

Comité scientifique & Comité d’organisation

Membres du comité scientifique :

BAUDELLE Guy, Université Rennes 2

BOURDIN Sébastien, EM Normandie

CULIE Jean Denis, EM Normandie

DEMAZIERE Christophe, Université de Tours

FABBRI Julie, EM Lyon Business School

JEANNE Ludovic, EM Normandie

JOFFRE Clémence, EM Normandie

KRAUSS Gerhard, Université Rennes 2

LIEFOOGHE Christine, Université de Lille

MINCHELLA Delphine, EM Normandie

NADOU Fabien, EM Normandie

NAPPI Ingrid, ESSEC Business School

PRIGENT Lionel, Université de Brest

Membres du comité local d’organisation :

JOFFRE Clémence, EM Normandie

KEMDJI Matthieu, EM Normandie

MINCHELLA Delphine, EM Normandie

NADOU Fabien, EM Normandie

Pour tout élément complémentaire merci d’adresser vos demandes : mkemdji@em-normandie.fr

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Bibliographie :

Anderson C., 2012. « Makers: the new industrial revolution », New York : Crown Business

Besson R., 2017. « Rôle et limites des tiers-lieux dans la fabrique des villes contemporaines »

Territoire en Mouvement 34.

Boutillier S., Capdevila I., Dupont L., Morel L.,2020. « Espaces et nouvelles formes d’organisation du

travail créatif » Innovation 61.

Burret A., (2017), « Étude de la reconfiguration en tiers-lieu : la repolitisation par le service », ibid.

Thèse.

Dupuy F., 2015. « La faillite de la pensée managériale », Le seuil.

Garrett L., Gretchen M S., Bacevice P., 2017. « CoConstructing a Sense of Community at Work: The

Emergence of Community in Coworking Spaces », Organization Studies.

Oldenburg R., 1989. « The Great Good Place », Da Capo Press.

Leducq D., Demaziere C., Coquel A., 2019. « Diffusion régionale et intégration urbaine des espaces de

coworking : les spécificités d’une région française faiblement métropolisée », Lavoisier « Géographie,

économie, société ».

Liefhooghe C., Leducq D., 2017, « La révolution numérique : tiers-lieux, hauts-lieux et

territorialisation » Territoire en Mouvement 34.

Moriset B., 2014. « Créer les nouveaux lieux de la ville créative Les espaces de

coworking », Conférence 2nd Geography of Innovation.

Scaillerez A., Tremblay D-G., 2017. « Coworking, fab labs et living labs. État des connaissances sur les

tierslieux. » Territoire en mouvement 34.